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Une personne assise sur un banc brut dans la nature
Affaires et économie

Semaine de la santé mentale : pensez aux vacances sans téléphone

Nouvelle tendance dans notre monde hyperbranché : les expériences de vacances sans téléphone, qui séduisent voyagistes, touristes et quiconque songe à faire un sevrage numérique.

L’hiver dernier, en visite au Louvre, j’ai remarqué des gens par dizaines qui s’obstruaient la vue avec leur téléphone. Au lieu de contempler la Joconde de leurs propres yeux pour en graver le souvenir dans leur mémoire, ils la regardaient à travers leur écran. 

Sans porter de jugement, on peut dire que notre expérience de la vie se fait beaucoup au moyen de notre téléphone. Nous sommes devenus dangereusement dépendants des services que nous procure cet appareil, dont nous serions captifs en moyenne près de quatre heures par jour, d’après une étude de DataReportal. 

Cette dépendance au téléphone mobile se répercute jusque sur nos vacances et sur nos interactions avec le monde qui nous entoure. Elle est bien révolue, l’époque des itinéraires MapQuest imprimés avant le départ et des cartes routières à déplier pour retrouver son chemin. Aujourd’hui, notre cellulaire fait office de copilote, de passe-temps et d’appareil photo. Par surcroît, il nous rend désormais joignables en tout temps, de sorte qu’il est difficile de prendre du recul par rapport à nos responsabilités professionnelles et personnelles. 

En réponse à cette surcharge technologique, les expériences de vacances sans téléphone séduisent voyagistes, touristes et quiconque songe à faire un sevrage numérique. 


Prendre soin de la santé mentale

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En juin 2023, l’île d’Ulko-Tammio, en Finlande, est devenue le premier lieu au monde à encourager ses visiteurs à délaisser leur téléphone pour mieux admirer l’immensité du territoire. En lançant cette offre d’excursion sur l’île et la campagne publicitaire qui l’accompagne, Johanna Tyynelä, directrice du tourisme, souhaitait amener les gens à « solliciter leurs sens pour se concentrer sur la nature environnante plutôt que sur leur appareil. Bien des gens ont du mal à laisser leur téléphone éteint, même en vacances. Partager des photos de voyage semble souvent plus important que de simplement jouir du moment présent. » 

Aucun règlement n’interdit d’apporter son appareil sur l’île. On recommande seulement de s’en abstenir, une mesure moins contraignante qu’une interdiction, qui risquerait d’assombrir le voyage des photographes amateurs. L’initiative a été couronnée de succès, et les visiteurs prennent désormais la mesure des beautés de l’île sans penser constamment à immortaliser le moment avec leur cellulaire ou à trouver leur prochaine destination, confirme Johanna Tyynelä. 

« Nous croyons qu’ainsi, l’île d’Ulko-Tammio gagnera en popularité et conservera son aura de sanctuaire empreint de paix et de sérénité. » 

Dans d’autres cadres, la règle du « sans téléphone » s’applique plus fermement. Par exemple, à l’entrée du festival de musique Over Yondr, dans le nord de l’État de New York, on remet aux participants un étui Yondr où ranger leur cellulaire afin de mieux profiter de l’événement. Cet étui se verrouille dès qu’on le ferme. Pour l’ouvrir, les festivaliers doivent sortir de la zone sans téléphone et le placer sur une borne de déverrouillage. 

Divers voyagistes offrent par ailleurs des forfaits et options sans téléphone, comme FTLO Travel, une agence spécialisée dans les vacances de groupe pour jeunes professionnels. Grâce à la socialisation inhérente aux voyages organisés, les jeunes trouvent moins intimidant de renoncer à leur appareil. 

Malgré tout, il demeure délicat d’imposer une déconnexion totale en voyage, car bien souvent, les vacanciers ont besoin de leur téléphone pour autre chose que la photographie et les médias sociaux. Citons, entre autres produits de la pandémie, les applications à télécharger pour s’enregistrer à l’hôtel ou pour consulter un menu à l’aide d’un code QR. 

L’auberge-boutique Somewhere Inn, à Calabogie (Ontario), a pour philosophie d’« inciter les citadins à s’évader pour communier avec la campagne. Nous croyons au pouvoir réparateur de dame Nature », explique son fondateur et copropriétaire, Joel Greaves. Étrange paradoxe, toutefois : l’enregistrement sans contact, adopté dans une optique de durabilité, oblige les visiteurs à utiliser leur appareil mobile. 

À ses yeux, l’essentiel reste de viser l’équilibre et, à l’instar de ce qu’on fait sur l’île d’Ulko-Tammio, d’encourager la déconnexion. 

En conséquence, pour ne pas soumettre les hôtes à la tentation, il n’y a pas de téléviseur dans les chambres du Somewhere Inn. Le cocktail de bienvenue au bar à vin, à l’arrivée, invite à la discussion avec les membres du personnel. Le foyer extérieur central, avec vue sur le lac, se veut un endroit propice aux échanges et à la contemplation du plan d’eau. Dans la même veine, d’autres aménagements de l’auberge incitent à la déconnexion. 

Bref, la popularité des expériences sans téléphone dénote un mouvement de résistance contre l’ingérence grandissante des technologies dans notre quotidien. Renoncer au cellulaire pour les vacances ne réglera sans doute pas tous les problèmes de dépendance au numérique, mais la déconnexion temporaire aide à mieux se recentrer, résume Joel Greaves. De son point de vue d’aubergiste et de passionné de voyages, ce n’est pas tant de délaisser le téléphone qui fait du bien, mais plutôt de ralentir le rythme. 

« Je prône le ralentourisme. Le but est d’amener les vacanciers à s’imprégner de la culture locale et à se libérer de leur téléphone le temps d’un séjour », conclut-il.