Charité bien ordonnée... aux yeux du fisc
L’ARC a des exigences claires en ce qui a trait aux activités de collecte de fonds, en particulier si des reçus sont délivrés. (Getty Images/SDI Productions)
Si vous planifiez une activité de financement d’une œuvre caritative où des reçus fiscaux seront remis, sachez que certains aspects complexes doivent être pris en compte.
Du point de vue de l’Agence du revenu du Canada (ARC), par exemple, les activités de collecte de fonds, tout comme le statut d’organisme de bienfaisance, doivent être conformes à un ensemble de règles très complexes, que les responsables d’une collecte de fonds et l’organisme bénéficiaire doivent connaître. Voici plus de détails sur ce qu’il faut savoir au préalable.
1) METTEZ-VOUS AU DIAPASON AVEC L’ORGANISME
D’abord, dans le cas d’une collecte de fonds par un tiers (ce qui, pour les fins du présent article, exclut les initiatives informelles telles que le sociofinancement ou autres campagnes sur les réseaux sociaux), vous devez prendre contact avec les représentants de l’organisme que vous voulez soutenir pour obtenir son consentement, conseille l’avocat Mark Blumberg, associé chez Blumberg Segal à Toronto. Confirmez auprès de l’organisme que ce que vous projetez de faire cadre bien avec ses politiques de don et de financement, ajoute-t-il. L’ARC suggère de rédiger une entente où seront précisées les dispositions.
« Les collectes de fonds par un tiers se révèlent bien utiles pour les organismes de charité, car quelqu’un d’autre se charge d’une bonne partie du travail, mentionne M. Blumberg. Les organisateurs doivent toutefois s’entretenir avec l’organisme au préalable, pour comprendre ses pratiques en matière de collecte de fonds ainsi que les tâches et l’information nécessaires. Ainsi, les choses seront clairement établies dès le départ. »
Assurez-vous que l’organisation que vous comptez soutenir est officiellement inscrite comme organisme de bienfaisance, ajoute Stan Swartz, CPA, président d’Infomoney Solutions, à Toronto. Pour ce faire, consultez le site Web de l’ARC. Cette vérification est d’autant plus importante si, pour l’activité que vous organisez, vous entendez remettre des reçus fiscaux. Au Canada, on compte entre 80 000 et 100 000 OSBL qui ne sont pas des organismes de bienfaisance enregistrés.
2) VEILLEZ À L’EXACTITUDE DES REÇUS
Lorsqu’on délivre des reçus, il faut tenir compte de tout ce que les invités reçoivent à l’activité (aliments, boissons, droits d’entrée à un tournoi de golf, location de voiturette, balles de golf, et même articles obtenus à un tirage au sort ou comme prix de présence ou cadeau), qui est considéré comme un avantage. Le montant admissible du don sera donc l’excédent du montant donné sur le montant de tout avantage reçu par le donateur. Les prix de présence doivent être évalués à leur valeur au détail; ces valeurs seront additionnées, puis calculées au prorata du nombre de billets vendus (plutôt que d’être affectées aux seuls gagnants). Les autres avantages sont déterminés en fonction de la valeur de ce que chaque participant reçoit réellement, précise l’ARC.
Les règles applicables aux tirages au sort dépendent de la façon dont l’activité de financement est organisée. Si les billets de participation sont inclus dans les droits d’entrée, les prix tirés sont traités de la même façon qu’un prix de présence : leur valeur doit être prise en compte dans la préparation des reçus. Cependant, si le tirage au sort est effectué séparément, c’est-à-dire s’il y a eu vente de billets pendant l’activité, celui-ci sera traité comme une loterie. Selon l’ARC, l’achat d’un billet de loterie n’est pas un cadeau. Par conséquent, le coût des billets pour un tirage n’est pas un don pour l’acheteur du billet, et les prix subséquents n’ont pas à être pris en compte dans le calcul de l’avantage pour les participants.
Heureusement, lorsque les avantages sont trop minimes pour influer sur la valeur d’un don, la règle du seuil minimum s’applique. Ce sera le cas si le total de tous les avantages reçus est considéré comme ayant une valeur symbolique. D’après les règles, cela signifie que l’avantage total ne dépasse pas 75 $ ou 10 % de la juste valeur marchande du don, selon le moins élevé des deux montants. En pareil cas, l’organisme de bienfaisance n’a pas à soustraire ces avantages au moment de produire les reçus.
Gardez à l’esprit, ajoute Me Blumberg, que si la valeur de l’avantage reçu par un donateur est supérieure à 80 % de la juste valeur marchande de son don, aucun don n’est réputé avoir été fait; de ce fait, aucun reçu ne sera délivré.
« Comme vous pouvez le constater, on est face à un écheveau de règles byzantines, que les organismes de charité doivent démêler. »
3) TRAITEZ CORRECTEMENT LES REÇUS POUR DONS AUTRES QU’EN ESPÈCES
Dans le cas de dons de biens ou de cadeaux autres qu’en espèces, comme ceux vendus lors d’une vente aux enchères, un reçu peut être remis au donateur du bien pour un montant correspondant à sa juste valeur marchande. L’adjudicataire (enchérisseur gagnant) peut aussi se voir délivrer un reçu – égal au montant payé pour l’article, moins la juste valeur marchande dudit article, sous réserve de la règle de l’avantage.
M. Swartz fait observer que la juste valeur marchande peut être difficile à déterminer pour certains biens, par exemple les œuvres d’art, qui devraient être évaluées par une personne à même d’en déterminer la valeur la plus juste. Pour d’autres biens, par exemple un téléviseur, l’évaluation sera plus facile; on n’a qu’à prendre le prix de détail suggéré.
Comme mentionné, la règle de l’avantage s’applique également aux ventes aux enchères. Par conséquent, un reçu pour don pour un article mis aux enchères ne peut être délivré à l’adjudicataire que si le montant de la proposition gagnante dépasse 80 % de la valeur de l’article, ajoute Michael Espinoza, CPA, directeur principal des services en fiscalité du bureau national de Grant Thornton. « Voyez cela comme un seuil minimal pour déterminer si l’enchérisseur avait réellement l’intention de faire un don. »
Enfin, les dons de services – notamment le temps, les compétences ou les efforts fournis à titre gracieux pour organiser une activité de financement – ne donnent pas droit à des reçus, car ils ne sont pas considérés comme des « biens » par l’ARC. Toutefois, si un particulier fournit un service qui est rémunéré par l’organisme de bienfaisance, puis que ce particulier retourne le paiement en cadeau, un reçu peut être délivré puisque deux opérations distinctes auront eu lieu.
4) EN UN MOT COMME EN CENT, SUIVEZ LES RÈGLES
Que des reçus soient délivrés pour une activité en personne ou en mode virtuel – souper, tournoi de golf ou vente aux enchères –, sachez que seul l’organisme de bienfaisance peut délivrer des reçus officiels, souligne M. Espinoza.
« Il est toujours important de s’assurer que les reçus pour don sont exacts, car des reçus inexacts ou frauduleux pourraient entraîner la révocation du statut d’organisme de bienfaisance enregistré », explique-t-il.
Bien que le présent article donne un aperçu des règles à suivre, assurez-vous de vous renseigner sur tous les aspects et d’avoir tout couvert en consultant le site Web de l’ARC. « Quel que soit le scénario, respectez les règles fiscales, posez les bonnes questions et alignez-vous sur les exemples affichés sur le site de l’ARC », conclut Stan Swartz.
IL EST SAGE DE RECOURIR À UNE OU UN CPA!
Le présent article comprend un résumé général des règles fiscales. Vous avez besoin de conseils fiscaux sur un ou plusieurs points en particulier? Faites appel à une comptable professionnelle agréée ou à un comptable professionnel agréé. Consultez en ligne le répertoire des membres de votre organisation provinciale ou régionale.
Face à des milliers de choix et autant de façons de faire des dons, il est difficile de décider quelle œuvre de charité soutenir. Cet article vous aidera à prendre une décision éclairée.