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Un couple portant des masques dans un aéroport entouré de valises
Fiscalité

Quitter le pays de façon permanente : une démarche lourde de conséquences fiscales

Vous pensez établir votre résidence fiscale hors du Canada? Vos biens, vos liens personnels et vos actifs auront un impact important sur votre déclaration. Une planification détaillée doit donc être effectuée avant que vous fassiez vos valises.

Un couple portant des masques dans un aéroport entouré de valisesAvant de quitter définitivement le pays, vous devrez prendre en compte plusieurs facteurs liés à la fiscalité. (Getty Images/gilaxia)

Environ trois millions de Canadiens vivent à l’extérieur du pays. Et de nombreux citoyens envisagent de faire la même chose à un moment donné de leur vie, que ce soit en raison d’une opportunité professionnelle, parce qu’ils ont envie de retourner dans leur pays d’origine ou simplement pour relaxer au chaud.

Mais quitter le Canada n’est pas une démarche anodine. Vous devrez, entre autres choses, réfléchir aux conséquences fiscales, surtout si vous prévoyez un départ définitif. Il y a de nombreuses règles à prendre en compte – les éléments énumérés ci-dessous n’en sont que quelques-uns. Voilà pourquoi les conseils d’un professionnel sont importants.

Virginie Vargel, CPA spécialisée en fiscalité des expatriés et des non-résidents, le confirme : « Si vous songez à vous établir à l’étranger, demander à un CPA de vous aider à planifier ce changement peut prévenir de nombreuses mauvaises surprises. »

Voici quatre éléments à garder en tête.

1) DÉFINIR SON STATUT DE RÉSIDENCE

« Pour déterminer si un contribuable doit continuer à payer des impôts au Canada, le gouvernement vérifiera en premier s’il a conservé des liens primaires au Canada, explique Annie Poitras, CPA, première directrice principale, Fiscalité américaine et internationale, chez Raymond Chabot Grant Thornton. Un domicile? Un époux ou conjoint de fait? Des personnes à charge, comme des enfants mineurs? Il tient aussi compte de liens secondaires, comme la possession de biens personnels, de comptes bancaires ou d’un permis de conduire valide. »

« Ces liens sont acceptables pourvu qu’ils puissent être justifiés, ajoute Annie Poitras. On peut avoir conservé son permis s’il est reconnu dans le pays d’accueil, ou demeurer propriétaire d’une résidence qu’on a louée en signant un bail. L’Agence du revenu du Canada (ARC) se questionne davantage quand une personne a quitté le pays mais conserve un logement vacant, par exemple, ou si elle y a encore des enfants à charge ou un époux ou conjoint de fait. Le statut de résidence repose sur des faits, mais aussi sur l’intention véritable du contribuable de quitter le pays. »

Cette étape franchie, vous serez considéré comme un émigrant et soumis à certaines restrictions. Par exemple, il ne vous sera plus possible de cotiser régulièrement à un CELI. Toutefois, comme on l’explique sur le site Web de l’ARC, « le montant de tout retrait que vous effectuerez durant cette période sera ajouté à vos droits de cotisation à un CELI de l’année suivant le retrait, mais vous pourrez utiliser les droits ainsi ajoutés seulement si vous redevenez un résident du Canada pour les besoins de l’impôt ».

Vous pourrez cotiser à un REER si vous avez des droits inutilisés, mais le faire alors que vous n’avez plus de revenus au pays ne serait pas très logique. « D’où l’importance de bien choisir la date de cessation de résidence », insiste Annie Poitras.

2) ÉVITER D’ÊTRE DOUBLEMENT IMPOSÉ

Obtenir le statut de non-résident est déterminant, car chaque pays d’accueil a ses propres règles fiscales et, souvent, une entente avec le Canada. 

« Le but, rappelle Annie Poitras, est de ne pas être doublement imposé. Le taux d’imposition d’un retrait REER est généralement de 25 % pour les non-résidents du Canada, mais, en fonction des ententes fiscales, ce taux peut baisser à 15 %, selon le mode de retrait. »

« La question de savoir si un REER sera doublement imposé dépend du pays d’accueil », explique Bruce Ball, FCPA, FCA, vice-président, Fiscalité, à CPA Canada. « Si le taux d’imposition est de 25 % mais qu’aucun impôt n’est payé dans le nouveau pays de résidence, il n’y a pas de double imposition. De plus, en fonction des retenues effectuées au Canada, certains pays pourraient accorder un crédit pour impôt étranger. Cela dépendra des règles fiscales de chacun. »

3) PAYER UN IMPÔT DE DÉPART

Au moment de quitter le Canada, l’ARC considère qu’un contribuable a disposé de certains types de biens à leur juste valeur marchande et qu’il les a immédiatement réacquis au même montant (on parle alors de disposition réputée). Ce faisant, il pourrait avoir à déclarer un gain en capital assujetti à l’impôt (appelé impôt de départ).

Mais cela n’implique pas de tout liquider hâtivement, insiste Annie Poitras.

« Bien des choses ne sont pas imposables, comme les meubles, véhicules et liquidités. La plupart des produits enregistrés (types REER ou CELI) ou des droits acquis au RPC ou au RRQ sont aussi exclus, puisqu’ils seront imposés ultérieurement. »

Même chose pour les actifs étrangers, comme les biens immobiliers, qui génèrent des gains en capital imposables, à moins que la personne ait résidé 60 mois ou moins au cours de la période de 10 ans précédant l’émigration et qu’elle ait détenu le bien au moment où la résidence a été établie, explique Virginie Vargel.

Inutile aussi de vouloir vendre sa résidence à tout prix, car la disposition réputée ne s’applique pas. « Il n’y a pas de gain en capital sur une résidence principale, rappelle Virginie Vargel. C’est seulement une fois qu’on a quitté le pays qu’elle devient imposable en cas de vente. Le cas échéant, on tiendra compte de la résidence principale désignée. »

Cela dit, « conserver un logement inoccupé peut poser des problèmes, surtout quand vient le temps de déterminer où la résidence doit être établie, rappelle Bruce Ball. Voilà pourquoi, souvent, les gens vendent ou louent leur logement. Mais si la propriété est louée, une disposition présumée en raison d’un changement d’utilisation peut s’appliquer, ainsi que diverses questions comme la retenue d’impôts sur des revenus locatifs. Il est donc important d’obtenir des conseils professionnels ».

Si la propriété est vendue une fois que le propriétaire est devenu un non-résident, celui-ci doit informer l’ARC de la disposition d’un bien canadien en remplissant le formulaire T2062 et envoyer le paiement ou une garantie acceptable pour couvrir l’impôt à payer qui en découle.

« Aussi, un solde dû dans le cadre du régime d’accession à la propriété devra être remboursé, sans quoi il sera inclus dans les revenus imposables », précise Virginie Vargel.

Il importe également, ajoute Annie Poitras, de signaler votre changement de statut aux institutions bancaires où vous avez des comptes qui génèrent des revenus passifs, comme des intérêts ou des dividendes. Et veillez à fournir votre adresse de correspondance à l’étranger. »

4) DÉCLARATION FINALE DE REVENUS ET REPORT D’IMPÔT

Votre date de départ devra être inscrite dans votre dernière déclaration de revenus, qui devra être produite au plus tard le 30 avril de l’année qui suit celle où vous quittez le Canada.

« Cette dernière déclaration s’apparente un peu à celle d’une personne décédée aux yeux des autorités fiscales, souligne Annie Poitras. C’est la dernière chance pour l’ARC d’imposer les revenus et les biens d’un résident canadien, y compris ses biens à l’étranger, comme un condo en Floride. » 

En produisant sa déclaration, un contribuable peut demander à reporter l’impôt de départ à payer sur les revenus liés à la disposition réputée de biens, explique Annie Poitras. Cela peut couvrir une partie ou la totalité des biens, sans limite de temps préétablie, et même si la date de retour éventuel au Canada n’a pas encore été décidée. « Certains peuvent en effet choisir de reporter ce paiement puisqu’ils pourraient revenir », précise Bruce Ball.

« Si la personne fournit certaines garanties [comme une lettre d’une banque], elle ne paiera pas d’impôt immédiatement, mais seulement quand les biens faisant l’objet de la garantie seront réputés avoir été effectivement cédés, explique Annie Poitras. Si le montant de l’impôt sur le revenu relatif à la disposition réputée de biens est supérieur à 16 500 $ (13 777,50 $ pour les ex-résidents du Québec), vous devrez fournir une garantie adéquate à l’ARC pour couvrir ce montant [voir le formulaire T1244]. »

Et elle rappelle : « Les conséquences fiscales d’un départ sont importantes et coûteuses. Or, un CPA peut étudier le bilan au stade du projet, avant la déclaration. C’est toujours bien moins cher de payer un spécialiste pour vous aider à planifier que de le payer pour réparer les erreurs commises. »

QUESTIONS FISCALES

Cet article comprend un résumé général de règles fiscales détaillées. Besoin de conseils fiscaux précis? Faites appel à un comptable professionnel agréé pour ne payer que votre juste part d’impôts. Consultez en ligne le répertoire des membres de votre organisation comptable provinciale ou régionale.

Vérifiez les dates importantes à connaître pour produire votre déclaration de revenus. Voyez aussi quoi faire si vous avez versé une cotisation excédentaire dans un REER ou CELI et quelle est la démarche à suivre si vous avez oublié de demander une déduction ou un crédit, ou de déclarer certains revenus.

Enfin, tenez-vous au courant des nouvelles récentes sur la fiscalité et la COVID-19, et obtenez des informations pratiques et de nouvelles perspectives grâce à notre blogue sur la fiscalité.