Le virage numérique, toujours d’actualité
Quand l’entreprise s’engage dans une transformation numérique, les équipes doivent être soigneusement constituées, en mettant l’accent sur le perfectionnement des compétences et l’innovation. (Getty Images/ Jay Yuno)
Un grand virage économique s’amorce. Le passage à l’industrie 4.0, aussi appelée quatrième révolution industrielle, transformera la fabrication grâce aux technologies numériques telles que la robotique, l’intelligence artificielle (IA), les chaînes de blocs et l’Internet des objets. Par conséquent, des fonctions telles que la gestion de la chaîne logistique, l’exploitation des machines, les communications en réseau et l’analyse des données subiront des bouleversements.
Or, il semble que les entreprises ont du retard à rattraper. Selon un rapport du cabinet Deloitte publié en janvier, seuls 17 % des chefs de l’expérience client interrogés ont répondu que les investissements dans les outils et méthodes dignes de la quatrième révolution industrielle étaient une priorité. Même si les dirigeants semblent reconnaître l’importance d’une approche intégrée pour les investissements à faire, seuls 5 % d’entre eux ont fait état de progrès importants en cette matière.
« C’est une occasion à saisir pour nos chefs d’entreprise, et un appel à l’action pour bon nombre d’organisations », affirme Anthony Viel, chef de la direction de Deloitte Canada.
Voici quatre conseils pour aider une entreprise à prendre le virage industrie 4.0.
1) CONSIDÉREZ L’ENSEMBLE DE LA SITUATION
Vu l’émergence de la pandémie, le virage industrie 4.0 a été retardé par une réflexion de réactivité à court terme, poursuit M. Viel, qui préconise plutôt une perspective élargie, à long terme.
« Dans ce cas-ci, le court-termisme mettrait un accent disproportionné sur la croissance des revenus et la maîtrise des coûts au détriment d’une vision et d’une prospérité à long terme, explique-t-il. Maintenant que nous procédons au déconfinement et que les entreprises reprennent leurs activités, nous devons faire preuve d’audace, contrebalancer les mesures à court terme, avoir un esprit de bâtisseur et ouvrir la voie à la réussite. »
C’est en préparant cet avenir que les CPA peuvent eux-mêmes briller, souligne M. Viel. Ils devront aller au-delà des états financiers qui résument les opérations passées et tirer parti de la technologie en temps réel digne de l’industrie 4.0 pour déterminer les prochaines étapes.
« Le rôle du CPA, c’est de se faire une idée des résultats actuels de l’organisation, de ses points de vue et de ses stratégies en vue d’exploiter les possibilités, dit-il. Cet examen façonnera les décisions de l’organisation et la préparera à être plus agile pour saisir les occasions qui ne manqueront pas de se présenter. »
2) COORDONNEZ VOS EFFORTS
Une lacune observée dans les efforts de mise en œuvre de l’industrie 4.0 est le manque de coordination entre les organisations, soutient Neil Manji, CPA, associé chez PwC, leader national, énergie, services publics, mines et produits industriels. Par exemple, plutôt que d’aligner les ressources et les projets sur l’objectif global de l’entreprise, des équipes déploient leurs efforts au niveau d’un seul service, ou au cas par cas.
« Ce qui tend à se passer, dans les entreprises, c’est que les équipes travaillent chacune de leur côté, à échelle réduite. Et parfois, les activités commencent à entrer en conflit les unes avec les autres, faute d’harmonisation. »
Cette approche fragmentaire conduit à un gaspillage de main-d’œuvre, de fonds et de ressources, croit Neil Manji, ce qui peut mener à un dédoublement des efforts ou à l’émergence de projets conflictuels. Il met en contraste les « novices du numérique » (entreprises à la phase d’évaluation) et les « champions du numérique » (entreprises qui progressent activement sur ce point).
« Les entreprises doivent considérer le virage 4.0 comme une progression vers le haut d’une courbe. Elles ont besoin d’une stratégie numérique qui sera définie au départ par un plan sur deux ans ou trois ans. »
3) ÉTABLISSEZ UNE STRATÉGIE
Selon l’enquête de Deloitte, deux tiers des chefs de l’expérience client n’ont pas de stratégie formelle, ou adoptent des approches ponctuelles à l’égard du virage industrie 4.0; en outre, seulement 10 % d’entre eux déclarent avoir des stratégies à long terme pour exploiter les nouvelles technologies.
L’élaboration d’une stratégie, explique M. Viel, implique la réalisation d’audits dans toute l’organisation afin de déterminer les lacunes, mais aussi les possibilités à exploiter : intégration des technologies, mise à jour des modèles d’affaires, création de rôles de leader et constitution d’équipes spécialisées et innovantes. Enfin, les organisations peuvent inciter leurs fournisseurs et partenaires à adopter eux aussi les technologies 4.0.
Les entreprises engagées dans cette voie « innovent et se développent plus rapidement, intègrent avec succès la technologie et réussissent mieux à attirer, à former et à retenir les talents dont elles auront besoin pour se redresser et prospérer », soutient M. Viel.
Les entreprises commencent à retrouver leur stabilité, et, parmi les considérations liées à la compétitivité, on trouve l’impact de la pandémie sur les chaînes d’approvisionnement : la production a été relocalisée à proximité, dans certains cas, d’où une augmentation des coûts des biens et de la main-d’œuvre, constate M. Manji.
« Du fait que les coûts augmentent, les entreprises doivent chercher à réaliser des économies ailleurs. Elles pourraient en faire en intensifiant la numérisation et l’automatisation, et en modifiant leurs opérations dans un souci d’efficience. »
M. Viel suggère aussi aux organisations de trouver des solutions axées sur la croissance, et de penser aux retombées sociales de leurs activités, comme tant d’autres l’ont fait pendant la pandémie. Les technologies adoptées devraient aider les entreprises à innover et à en arriver à des retentissements positifs sur le monde, croit-il. Toutefois, ce faisant, des aspects tels que la cybersécurité, le respect de la vie privée et la réglementation gouvernementale devront également être pris en compte.
« Lorsqu’elles mettent en place une stratégie 4.0, les entreprises doivent s’assurer qu’elles développent et utilisent des technologies avancées dans le respect des principes d’éthique, et prendre à cœur leurs responsabilités, en vue d’assurer un meilleur avenir », soutient-il.
4) DONNEZ L’EXEMPLE
Il est essentiel de choisir un chef d’équipe à la hauteur pour mettre en place une stratégie industrie 4.0.
Le dirigeant doit avoir les compétences et l’expérience nécessaires pour guider l’organisation et son personnel, au fil de la transformation numérique, soutient M. Manji. Il devra aussi comprendre comment gérer les relations avec les parties prenantes externes et connaître parfaitement les fonctions et opérations internes de l’entreprise, en particulier les finances.
« C’est loin d’être un projet secondaire, qui traînera sur le bureau de quelqu’un, lance M. Manji. Choisissez un leader, qui siège à la table des dirigeants, qui prendra à cœur ses responsabilités, saura intégrer la stratégie numérique à toutes les étapes et attirera des ressources de talent. »
Enfin, la résilience est également essentielle, croit M. Viel.
« Les leaders résilients sauront cerner et prendre en compte les incertitudes et les implications qui, après la pandémie, auront transformé nos comportements, nos vécus et nos attentes, tout en faisant ressortir l’importance de la mobilisation numérique; il leur incombera d’intervenir en conséquence », conclut-il.
LECTURES UTILES
Si vous dirigez une petite entreprise, consultez nos conseils pour éviter les écueils, réagir au quart de tour et utiliser à bon escient l’aide financière du gouvernement fédéral. Les restrictions liées à la pandémie étant levées progressivement dans tout le pays, voyez comment rouvrir vos portes au personnel et aux clients, réaménager vos bureaux et composer avec un éventuel reconfinement.