COP27, les points d’intérêt à retenir pour les CPA
La direction doit réfléchir aux risques qu’apportent les changements climatiques et à leurs répercussions sur les activités, l’exploitation et les finances. (Getty Images/Cecilie Arcurs)
Voilà quelques semaines, réunis à la 27e conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP27), tenue à Charm-el-Cheikh, en Égypte, les délégués se sont penchés sur les obstacles financiers et sociétaux qui entravent l’action contre le réchauffement de la planète. Alors qu’à la COP26 de 2021, organisée à Glasgow, les participants s’étaient attachés à cerner les enjeux et à officialiser les engagements, cette année, les discussions ont porté sur la planification d’initiatives.
« L’action était au cœur des débats », signale Rosemary McGuire, vice-présidente, Recherche, orientation et soutien à CPA Canada. « Le sommet de 2022 a fait ressortir l’ampleur des travaux à accomplir pour les acteurs des secteurs public et privé. »
Voici certains points d’intérêt pour les CPA.
RETARDS DANS LES OBJECTIFS
Le retard des pays dans la réalisation de leurs objectifs de lutte contre les changements climatiques soulève des inquiétudes. Selon le rapport de la COP27, les efforts actuels restent insuffisants pour limiter la hausse de la température mondiale à 1,5 °C, et une action climatique ambitieuse s’impose.
« Le hic, c’est que beaucoup de pays n’en sont pas au même point que nous », explique David-Alexandre Brassard, économiste en chef à CPA Canada. « La croissance va généralement de pair avec une augmentation des émissions, jusqu’à ce que le secteur des services devienne assez solide pour qu’on dissocie développement et CO2. De surcroît, le conflit en Ukraine et la vulnérabilité énergétique qui s’ensuit pour l’Europe compliquent les efforts environnementaux mondiaux. »
APPEL À LA COMPENSATION DES PERTES ET PRÉJUDICES
Tous continuent de déplorer la lenteur de la mobilisation de capitaux privés, souligne Rosemary McGuire. « Les crédits carbone jouent un rôle clé dans le financement de la lutte contre les changements climatiques, surtout pour les pays en développement. »
À ce chapitre, les États-Unis ont profité de la COP27 pour lancer la démarche Energy Transition Accelerator, une initiative mondiale d’échange de crédits carbone, menée dans le cadre d’un partenariat public-privé entre Washington, la Rockefeller Foundation et le Bezos Earth Fund. Le but? D’abord, attirer des financements du secteur privé par l’intermédiaire d’un programme de crédits carbone volontaire. Aussi, stimuler l’investissement dans les énergies renouvelables en appui à la transition énergétique dans les pays en développement, qui peinent souvent à financer leurs projets.
De plus, on a annoncé à la COP27 un accord historique de financement des pertes et préjudices : on souligne la nécessité que les grands émetteurs, c’est-à-dire les pays industrialisés, fournissent aux pays en développement un financement pour compenser les dommages qu’entraînent les changements climatiques. Le groupe s’est engagé à mettre sur pied une structure d’aide pour les économies vulnérables, qui sera concrétisée à la COP28, en 2023.
« Le financement des pertes et préjudices figure parmi les aspects essentiels des efforts visant à bâtir un lien de confiance avec les nations les plus durement touchées par les catastrophes climatiques », fait remarquer David-Alexandre Brassard.
ÉTOFFEMENT DU CADRE NORMATIF
Cette année, le Conseil des normes internationales d’information sur la durabilité (International Sustainability Standards Board – ISSB) a entrepris de mettre en place l’architecture nécessaire à la création d’un référentiel d’information sur la durabilité. De plus, l’ISSB a annoncé les prochaines étapes de son cadre de partenariat, conçu pour aider plus de 30 organisations participantes dans leur préparation à l’adoption des normes IFRS d’information sur la durabilité.
« Le renforcement de la reddition de comptes et de la transparence à l’égard des risques et des engagements afférents aux changements climatiques s’est à nouveau hissé parmi les thèmes centraux à la COP27, surtout grâce à l’ISSB, précise Rosemary McGuire. L’ISSB agit vite et avance à grands pas depuis la COP26. »
Après la publication des normes initiales, en 2023, CPA Canada surveillera de près les engagements d’adoption des normes IFRS d’information sur la durabilité. Par ailleurs, les choses vont bon train dans la mise sur pied d’un Conseil canadien des normes d’information sur la durabilité, qui travaillera en étroite collaboration avec l’ISSB et veillera à faire valoir les points de vue d’ici dans la prise de décisions à l’échelle internationale.
« L’adoption généralisée des normes contribuera à ce que soient communiquées aux investisseurs les informations complètes nécessaires pour prendre des décisions éclairées. Les entités ont aussi grand besoin de normes sur les engagements de carboneutralité. Nous surveillerons en outre les priorités de l’ISSB dans le cadre de son futur programme de travail. La biodiversité et l’eau figurent en tête de liste des sujets d’information sur la durabilité qui méritent une attention accrue. »
PRIORITÉ À LA REDDITION DE COMPTES EN CARBONEUTRALITÉ
Le rapport du Groupe d’experts de haut niveau des Nations Unies sur les engagements de zéro émission nette des entités non étatiques l’a souligné : des préoccupations ont été soulevées quant à l’intégrité de tels engagements, d’où la formulation de certaines recommandations clés en faveur d’une réglementation qui favorisera la réalisation des objectifs.
Pour mieux lutter contre l’écoblanchiment et assurer l’égalité des chances, selon les constats des auteurs du rapport, les entités non étatiques doivent passer des initiatives volontaires à des exigences de carboneutralité réglementées. Nombre d’entre elles, surtout les sociétés fermées et les sociétés d’État, n’ont pris aucun engagement de zéro émission nette à ce jour, d’où des inquiétudes à l’égard de la compétitivité.
Selon Rosemary McGuire, « toute entité qui a pris un engagement de carboneutralité ou qui songe à le faire est interpellée. Toutefois, nul ne sait comment se manifestera l’interrelation entre les recommandations du Groupe d’experts et les faits nouveaux en information sur la durabilité. »
REGARD SUR LES SECTEURS À ÉMISSIONS ÉLEVÉES
Enfin, c’est cette année qu’a eu lieu le lancement du programme de travail sur l’atténuation, qui comporte un plan pour accélérer la décarbonation dans cinq domaines : l’énergie, le transport routier, la sidérurgie, l’hydrogène et l’agriculture.
« L’agriculture durable fait partie des axes prioritaires, vu l’ampleur de son empreinte carbone, explique Rosemary McGuire. C’est particulièrement important pour le Canada, et les regards continueront de se tourner vers le secteur, notamment lors de la COP15 sur la biodiversité à Montréal. »
« Le tout se répercutera aussi dans la sphère de l’information sur les émissions, ajoute David-Alexandre Brassard. Les entreprises et gouvernements ont besoin d’informations affinées sur les émissions. Les CPA peuvent donc s’attendre à une généralisation des obligations d’information. »
PROCHAINES ÉTAPES
« Nous avons été témoin, cette année, du début de la mise en œuvre d’un plan, résume David-Alexandre Brassard. Cette fois-ci, les participants commencent à passer de la parole aux actes. Deux questions primordiales se posent : les progrès sont-ils assez rapides et le financement sera-t-il à la hauteur pour respecter les engagements de la COP26? »
« La prise de conscience se fait, on constate qu’il y a interconnexion entre les différents systèmes, poursuit Rosemary McGuire. Par exemple, pour lutter contre les changements climatiques, il faut penser à des solutions basées sur la nature et prendre en considération les conséquences pour les êtres humains et les collectivités. Tout transfert de capitaux vers des investissements carboneutres sera conditionnel à des critères clairs et à des données fiables. À bien des égards, nous devons redéfinir la lutte contre les changements climatiques et notre façon de la mener. »
Elle recommande aux organisations de s’y mettre d’emblée. « N’attendez pas qu’une réglementation entre en vigueur pour commencer à réfléchir aux implications qu’auront ces évolutions pour votre organisation. Informez-vous et évaluez les risques qu’entraînent les changements climatiques pour l’organisation. Pensez à leurs répercussions sur les activités, l’exploitation, les finances. »
COMPTABILITÉ ET CHANGEMENTS CLIMATIQUES
CPA Canada a été parmi les premières organisations à considérer les changements climatiques comme un enjeu économique. Découvrez nos ressources sur les changements climatiques pour les CPA ainsi que les raisons derrière l’essor du poste de chef du développement durable.
Lisez le rapport de CPA Canada sur l’engagement du Canada à atteindre la carboneutralité d’ici 2050, et voyez le rôle déterminant que joueront les CPA dans la transition.