Quand un client en fiscalité veut s’opposer à l’ARC
Pour présenter une opposition à l’ARC, il est important de respecter les détails prescrits. (Getty Images/SDI Productions)
Les fiscalistes le savent : les clients reçoivent parfois un avis de cotisation ou de détermination qui ne correspond pas à leur déclaration de revenus. Et selon la complexité du dossier, on peut le régler en faisant une simple demande de redressement, en présentant une opposition, ou en interjetant appel devant la Cour canadienne de l’impôt.
« Pour aider les contribuables et leurs représentants à comprendre le processus, l’Agence du revenu du Canada (ARC) offre une mine d’information sur son site Web ainsi qu’un arbre de décision pour diverses situations, explique Bruce Ball, FCPA, vice-président, Fiscalité, à CPA Canada. Le site contient également des précisions sur d’autres types d’oppositions, notamment concernant les taxes (comme la TPS/TVH), l’assurance-emploi et le Régime de pensions du Canada. »
Voici d’importants points à prendre en considération au moment de présenter une opposition en matière d’impôt sur le revenu pour un particulier. (Ces points sont semblables pour les autres contribuables, mais des règles additionnelles, que nous n’aborderons pas ici, s’appliquent aux grandes sociétés.)
SUIVEZ LES ÉTAPES
Si votre client n’est pas d’accord avec un avis de cotisation, il y a un processus à suivre, qui est détaillé sur le site de l’ARC :
- Le contribuable ou son représentant communique avec l’ARC pour tenter de régler la situation sans entreprendre le processus officiel d’opposition.
- S’il est impossible d’en venir à une entente en envoyant une lettre à l’ARC, le contribuable ou son représentant peut déposer un avis d’opposition dans les délais prescrits. Dans les faits, un tel avis peut être déposé pendant que l’on tente de régler le problème de manière informelle; on évitera ainsi de rater la date limite de présentation d’une opposition, conseille David Posner, CPA et associé à Zeifmans.
- Une fois l’opposition présentée, le dossier est assigné à un agent des appels, qui examine la cotisation et tous les renseignements fournis avant de prendre une décision. Comme l’explique Mark Tonkovich, associé chez Blake, Cassels & Graydon, cette étape peut supposer des rencontres, des appels et la présentation d’autres documents afin que l’ARC ait toute l’information nécessaire pour en arriver à une décision projetée.
- Si vous n’êtes pas d’accord avec la décision projetée de l’agent des appels (avant qu’une décision définitive soit rendue), il est parfois possible de demander l’examen du dossier par un autre agent des appels.
- L’agent des appels rendra sa décision définitive, qui peut confirmer la cotisation antérieure, l’annuler ou établir une nouvelle cotisation. « Il peut décider qu’il est en accord avec une partie des renseignements que vous avez fournis », constate David Posner.
- Si le processus ne porte pas ses fruits et si une décision définitive défavorable est rendue, le contribuable peut interjeter appel devant la Cour canadienne de l’impôt (et ensuite, devant la Cour d’appel fédérale, puis, dans certains cas, la Cour suprême du Canada).
PENSEZ AUX PRINCIPAUX CAS DE FIGURE
Comme le fait observer Bruce Ball, bon nombre de cas sont assez simples et peuvent être réglés d’entrée de jeu, avant même la présentation d’une opposition officielle. « L’ARC peut par exemple avoir fait une erreur en traitant une demande, qui aurait manifestement dû être acceptée. On peut alors demander un redressement de déclaration de revenus. »
Or, selon d’autres facteurs, comme le montant en jeu et la complexité des questions sous-jacentes, il y aurait lieu de présenter tout de même une opposition, ajoute-t-il. « Par ailleurs, si on choisit l’option du redressement, il faut suivre de près l’évolution de la demande sans perdre de vue la date limite de présentation d’une opposition. Si la demande de redressement risque de ne pas être traitée avant cette date limite, il vaudrait mieux présenter une opposition. »
Voici certains cas qui nécessitent généralement la présentation d’une opposition.
Frais de garde d’enfants : David Posner explique que l’ARC peut demander des documents justificatifs, mais ne pas admettre ce qui est fourni.
Dépenses associées au revenu de placements : L’ARC veut des pièces justificatives bien précises, poursuit David Posner. « Elle pourrait ne pas être satisfaite de ce que vous avez envoyé, même si la dépense est en elle-même déductible. »
T3 et T5 : Votre client peut avoir plusieurs T3 et T5, et l’ARC a ses propres exemplaires. « L’Agence peut revoir la cotisation établie parce qu’elle croit que votre client a oublié de déclarer quelque chose », souligne David Posner.
La cotisation ne tient pas compte d’une certaine demande : Dans ce cas, David Posner recommande d’appeler l’ARC ou de lui écrire pour savoir pourquoi elle n’a pas traité la demande. « Vous pourrez ensuite modifier la déclaration ou vous opposer à la cotisation. »
Une pénalité pour production tardive est imposée : « Si vous êtes en mesure de prouver que la déclaration a été produite à temps, vous pouvez vous opposer à cette pénalité », résume Bruce Ball. Si la pénalité est toutefois justifiée par la loi, vous pouvez, en cas de circonstances atténuantes, demander un allègement pour les contribuables. [Pour les autres cas de figure en matière de production tardive, voir notre article intitulé Comment tirer parti du programme d’allègement pour les contribuables : conseils d’experts.]
N’OUBLIEZ PAS LA PÉRIODE D’OPPOSITION
Si le contribuable décide d’entreprendre le processus officiel d’opposition, il doit respecter les dates limites. L’avis d’opposition doit généralement être présenté dans les 90 jours suivant la date d’envoi de l’avis de cotisation ou de nouvelle cotisation. Les particuliers (autres que des fiducies) et les successions assujetties à l’imposition à taux progressifs ont un an après la date d’échéance de production de la déclaration pour présenter leur opposition, si cette date est postérieure au délai général de 90 jours.
Vous pouvez présenter une opposition en remplissant le formulaire de l’ARC T400A (Avis d’opposition) ou en utilisant le service en ligne « Produire un avis de différend officiel » dans les portails Mon dossier, Mon dossier d’entreprise ou Représenter un client.
David Posner rappelle toutefois que si la date limite n’a pas été respectée pour une bonne raison (par exemple, une maladie ou un décès dans la famille), l’ARC se montre généralement très compréhensive. « Elle accorde souvent un délai supplémentaire, pourvu que certaines exigences procédurales additionnelles soient respectées et que la demande soit déposée dans l’année suivant la date limite d’opposition. »
Il se souvient par ailleurs d’avoir appelé l’ARC pendant le délai de 90 jours pour demander une révision donnée, qui n’a finalement pas été apportée avant la date limite d’opposition. « Notre appel téléphonique a fait office de preuve de notre opposition, même si la demande n’avait pas été officiellement écrite. L’ARC l’a donc admise. »
« Si l’opposition est présentée avec plus d’un an de retard, il est pratiquement impossible qu’elle soit admise », précise-t-il. Il ajoute qu’aucun délai n’encadre le temps de réponse de l’ARC.
SUIVEZ LES PRATIQUES EXEMPLAIRES
Plusieurs pratiques exemplaires encadrent la présentation d’une opposition.
- Présentez les pièces justificatives (par voie numérique, si possible) de manière soignée et organisée.
- N’envoyez pas plus d’information que ce qui est exigé ou nécessaire pour appuyer votre position. Assurez-vous que la situation et la solution escomptée sont clairement décrites.
- Si, à l’approche de la date limite d’opposition, vous n’avez pas encore rassemblé tous les renseignements requis, il vaut mieux présenter une lettre expliquant que vous vous opposez à la cotisation et que vous transmettrez tous les détails à une date ultérieure que de présenter l’opposition en retard. « Cela dit, il est généralement préférable de soumettre un dossier complet quand c’est possible », nuance Bruce Ball.
- Sachez quand il vaut mieux consulter un avocat fiscaliste, par exemple s’il y a désaccord sur l’interprétation de la loi. [Voir l’article intitulé Processus d’opposition de l’ARC : quand les CPA doivent-ils faire appel à un avocat?]
Il est par ailleurs important d’avoir une bonne vue d’ensemble du processus d’opposition. Comme Mark Tonkovich le fait remarquer, le processus peut varier considérablement d’un cas à l’autre. Selon les circonstances, les contribuables peuvent décider de passer outre le processus en entier ou en partie pour aller directement en cour.
« Si le processus ne s’annonce pas aussi efficace que le contribuable le souhaite, ou s’il ne donnera vraisemblablement pas lieu à l’allègement espéré, on peut décider d’y renoncer pour interjeter appel devant la Cour canadienne de l’impôt 90 jours après la présentation de l’opposition. Dans le cadre du processus d’appel, c’est principalement le contribuable qui décide de la manière de traiter les différents enjeux. »
RESTEZ AU FAIT DES QUESTIONS FISCALES
Apprenez-en plus sur le programme d’allègement pour les contribuables de l’ARC et sachez quand obtenir l’avis d’un avocat durant le processus d’appel.
Restez au fait d’importantes questions dans le domaine, comme la gestion et l’atténuation des risques liés à la prestation de services fiscaux, les services fiscaux de grande qualité et les règles applicables aux entreprises de prestation de services personnels, en consultant notre blogue.